A l’auditorium de Lyon, un Pierre et le loup loin des sentiers battus

Pierre et le loup pour orgue et pianoPierre et le loup, on en connaît quelques versions… Eh bien les petits mélomanes n’avaient pas encore testé celle pour orgue ! C’est chose faite à l’Auditorium de Lyon, où le 22 juin dernier Florian Santos a de nouveau proposé son adaptation très originale du fameux conte, en compagnie d’Octavian Saunier à l’orgue et de Dimitri Papadopoulos au piano.

Nouvelle venue sur ce blog, je prends la plume pour un reportage spécial à Lyon. Car oui, il existe une vie culturelle et musicale aussi en dehors de Paris, et plus exactement une vie musicale adaptée aux enfants ! En voici le récit…

Depuis le temps que tante Julia me raconte les époustouflantes aventures du Grand et du Petit dans le monde des petits mélomanes, j’avoue que j’avais bien envie de tenter aussi avec mon Aîné, conscrit du Grand, un spectacle musical pour enfant. L’affaire n’est pas dans le sac car l’Aîné n’est pas un mélomane, il est plutôt dans l’art plastique (Et en relief. Du genre installation d’art contemporain partout dans la maison, vous voyez ?).

Comme nous habitons tout près de la 2e plus grande ville de France (non, pas celle en bord de Méditerranée, l’autre), je peux raisonnablement espérer trouver un programme « pour enfant » à l’Opéra ou à l’Auditorium. Je jette mon dévolu sur le second, moins impressionnant pour un premier essai. Ce printemps étaient proposés, entre autres, Peter Pan (par Olivier Pénard), et le très célèbre Pierre et le Loup, bien connu de tous les enfants (je crois ?). Je signe pour le second sans rien lire du descriptif : C’est un classique, avec une histoire récitée, cela ne peut que plaire à l’Aîné, non ?

Ascension de l’Auditorium

Ce mercredi après-midi, nous voilà devant l’entrée de l’Auditorium de Lyon. Avant de rentrer dans le vif du sujet, un mot sur le bâtiment (eh oui, je suis historienne et guide, on ne se refait pas !). Il a été construit avec l’ensemble du quartier Part-Dieu dans les années 1970, dans un matériau bien à la mode à Lyon : le béton armé. Sa réalisation est une prouesse architecturale signée Charles Delfante et Henri Pottier. La salle elle-même, toute coffrée de bois, contraste avec le béton brut des espaces de circulation et de l’extérieur. Avec sa forme de théâtre antique et son fort dénivelé, elle accueille confortablement plus de 2000 auditeurs.

Nous empruntons donc « l’entrée du public », qui a des allures très sympathiques de passage secret (mise en condition garantie avec les enfants !) et nous retrouvons mêlés à toute la marmaille enfantée par Lyon, ou presque ! Imaginez le rassemblement de quelques 1000 gones et fenottes de 4 à 10 ans plus ou moins sages, dans cet habituellement très sérieux hall d’accueil ! Mais le temps n’est pas à la rêverie. L’Aîné et moi rejoignons la file pour le « 2e balcon », montons quelques milliers de marches  et nous retrouvons tout en haut, mais vraiment tout tout en haut, de la salle. Et devinez quoi ? Et bien nos places étaient aussi tout en haut, vraiment tout tout en haut, au dernier rang !

La salle se remplit aux trois-quarts environ. Cela bruisse sans cesse de cris, rires et grandes conversations sérieuses. Cela ne tient pas en place, jusqu’à ce que la lumière diminue et que la même voix que pour les spectacles d’adultes nous rappelle que nous ne sommes pas autorisés à photographier ou enregistrer le spectacle.

public de Pierre et le loup auditorium de lyonSi l’Aîné n’a pas l’habitude des représentations pour enfants, forcément moi non plus. Première surprise : le silence ne se fit jamais. Non? Rien de cette lourde attente du chef d’orchestre, du maestro, et de son ou sa soliste, rien des toux gênées, cachées sous les coups de cymbales (au mieux) ou éclatant au moment d’une respiration du chœur (au pire). Non, cela bruissait avant et cela continue. Cela tousse tout le temps, quand cela veut. Cela bouge tout le temps, monte sur les genoux du parent, se recroqueville dans le siège-strapontin (qui se replie, c’est trop bien !), et bien sûr va faire pipi. Cela arrive en retard, mais pour le coup ce n’est pas le privilège de la jeunesse. En fait, c’est très bien ! Ce bruissement continu nous a permis, l’Aîné et moi, de mutuellement se commenter le spectacle tout du long, sans se sentir coupables. Et je suis certaine que la moitié de la salle faisait de même.

Orgue et jeux de lumières

Un homme monte sur l’avant-scène. Grand chapeau, grand manteau et grand livre sous le bras, qu’il ouvre aussitôt; pour nous expliquer que non, Pierre et le Loup n’est pas un conte russe mais roumain. Grâce à une blondinette de sa classe, l’Aîné sait ce qu’est la Russie. Mais la Roumanie …

Et Grand-manteau-grand-chapeau de nous expliquer que Pierre vit dans le fin fond de la campagne avec son grand-père peu aimable et son père inventeur. J’ai de très vagues souvenirs de l’histoire de Pierre et le Loup, pourtant écoutée mille et une fois sur une vielle stéréo, et je peux me tromper… Mais je ne vois pas de papa-inventeur dans l’histoire de Prokofiev. Ni que le papa inventeur est à l’origine de l’oiseau, du chat et du canard, nés par des mélanges incluant fourrure de maman-défunte, boite à musique et instruments !
Mais après tout, pourquoi pas ?
Le ton du récitant, sans être monotone, manque un peu de verve et de vie, je crains que l’Aîné ne s’ennuie vite. De plus sur scène, point d’orchestre, point de clarinette, de hautbois, de flute traversière pour les trois animaux déjà présentés, point de cordes pour le thème de Pierre… juste un piano et un orgue.
Ah, j’ai oublié de vous présenter l’orgue.
Au fond de la salle, protégé par d’immenses rideaux de bois, se trouve un orgue, un vrai. Vous savez, celui de nos églises, avec de bons et longs tuyaux. Et en bord de scène, se trouve le clavier de commande. Un piano a été installé juste à côté, pour cette représentation. (Je vous parlerai, à l’occasion, d’un autre orgue de ma région, installé de façon permanente là où on ne l’attend pas et où il fait le bonheur des petits et l’émotion des grands !)

pierre et le loup auditorium lyonBref, donc, je crains l’ennui de l’Aîné, mais heureusement le spectacle prend de l’ampleur : Grand-manteau-grand-chapeau abandonne son livre, bondit sur la scène, où les jeux de lumières ont fait apparaître par miracle la mare, les champs et la forêt, cadre de l’intrigue. Grand-manteau-grand-chapeau mime chaque personnage quand son thème est présenté à l’orgue et au piano. Rapidement l’Aîné comprend qu’à chaque mélodie correspond un animal ou un humain. L’action s’enchaîne rapidement. Je ne crois pas trop vous gâcher le spectacle en vous révélant que le canard passe un mauvais moment, le loup un bien plus mauvais et que tout finit par une marche triomphale.

2 actes pour une adaptation libre et réussie

Applaudissements et salutation des trois artistes.
Râle de l’Aîné : « Mais c’est déjà fini ! Rôôôh ! »
Rideau à la 40e minute ?
Et bien non.
Mais ne comptez pas sur moi pour vous gâcher la découverte en vous racontant le 2nd acte de ce spectacle très réussi, qui parvient à revisiter avec beaucoup d’humour une histoire connue par la plus grande partie des parents et des enfants, à exciter la curiosité de nos gones et fenottes même après une heure sur un siège-strapontin, à la faire participer même, cette chère marmaille à 1000 têtes !
Je laisserai simplement glisser que TV zouzou c’est passionnant, que la blague du pépé en slip … c’est un classique à 5 ans, et que le héros n’est pas celui qu’on croit !

Résultat, l’Aîné a adoré et applaudi, a même voulu « bisser », tout en avouant en sortant que le spectacle était pour le coup assez long comme cela. Pour une première expérience, c’était très concluant, donc je me suis emparée du programme de l’an prochain dans le hall, bien décidée à continuer sur ma lancée ! The Amazing Keystone Big Band présentera son Carnaval des Animaux, je crois qu’on ne va pas le manquer …
Une déception, l’impression de ne pas avoir pu être attentive à la musique elle-même, reléguée au second plan, particulièrement au second acte, par le développement théâtral. Ce n’était clairement pas l’aspect instrumental du spectacle qui retenait l’attention des jeunes spectateurs. Mais comment lutter contre un récitant mimant un combat de Kung-fu ?! En rentrant, je suis tout de même allée jeter un œil sur le site web de l’auditorium, pour en savoir plus sur nos artistes. Accompagné d’Octavian Saunier à l’orgue et de Dimitri Papadopoulos au piano, Florian Santos est ce récitant/comédien/metteur en scène/Grand-manteau-grand-chapeau qui a su captiver les petits et les grands déjà la saison dernière et qui a proposé à nouveau aux Lyonnais cette plongé originale dans un conte si classique.
Et vive « coin-coin super canard » !

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