LA BOITE A JOUJOUX

La boite a joujouxLe 6 décembre prochain, j’emmène le Grand assister au concert de la Boîte à Joujoux à la Maison de la Radio. C’est un concert que j’ai eu envie de « préparer », parce que je ne crois pas que ce soit une œuvre si facile que ça. Si je mets des guillemets, c’est que j’avais déjà pris un peu d’avance avec l’émission que lui a consacré Philippe Cassard dans Le Matin des musiciens pour les fêtes 2013. Ici j’ai surtout essayé de comparer les versions disponibles, histoire de permettre au Grand d’anticiper.

HISTOIRE ET VERSION

Avec La Boîte à Joujoux Debussy a créé un ballet pour enfants, d’abord pour piano, dédié, comme Children’s Corner, à sa fille Chouchou. L’intrigue : Dans une boîte à jouets, les amours d’un soldat, d’une poupée et d’un Polichinelle. L’histoire consiste plutôt en des indications de Debussy, ce qui laisse le champ libre à de nouvelles créations.

J’ai écouté les trois versions que j’avais sous la main, soit une version pour quintette racontée par Nathalie Dessay (Didier Jeunesse), et deux versions pour piano, l’une par Jérôme Ducros et Laurence Ferrari, l’autre éditée par le Petit Ménéstrel (1966). Seule la version racontée par Nathalie Dessay présente une histoire inédite, les deux autres reprenant le livret originel.

DES VENTS ET DU COEUR

Dans l’histoire écrite par Rascal, justement, la poupée, prénommée Chouchou, se fait voler son cœur (littéralement) par Polichinelle alors qu’elle allait épouser le soldat. L’intrigue est largement enrichie par rapport à celle imaginée par Debussy et Claude Hellé, et c’est vrai qu’elle est plutôt séduisante, avec ce cœur de poupée qui s’arrête de battre. Les descriptions, riches, sont de celles qui provoquent l’imaginaire et affermissent le vocabulaire.

La musique, orchestrée pour instruments à vent (flûte, hautbois, clarinette, basson, cor) et une harpe, est interprétée par l’ensemble Agora. Et il faut avouer que, et même si j’aime beaucoup la version pour piano, les instruments à vent produisent une mélodie peut-être plus accessible aux petites oreilles. La gaité, les dissonances burlesques et les motifs des personnages sont soulignés. C’est vrai qu’il est plus facile de faire sonner différentes voix avec plusieurs instruments qu’avec dix doigts. Par exemple, le motif du soldat, au cor, est reconnu immédiatement, même s’il est au final peu utilisé directement par le texte. L’expressivité de la musique est plus appuyée parce qu’elle est de nature différente.

Un gros atout de cette version est la fiche pédagogique offerte par Didier Jeunesse, l’éditeur, sur son site web. Il présente le contexte et met l’accent sur les instruments. Par exemple il donne le minutage des citations de musiques traditionnelles, comme « Il était une Bergère ». Pratique !

LES VERSIONS CLASSIQUES POUR PIANO

Boite a joujoux Petit MenestrelDans la version du Petit Ménestrel, on a une narration à la Pierre et le Loup. Chaque personnage principal est cité avant que soit joué le motif musical qui le caractérise. Cette manière d’aider l’enfant à investir la musique via l’intrigue est à mon avis une bonne vieille recette très efficace.

Le texte du livret ne présente pas une histoire très moderne, et en soi ne présente pas un intérêt fort. Les commentaires datés mis à part, du type « le nègre », l’histoire évolue vers la vieillesse de la poupée qui ne peut plus danser, ce qui a un intérêt limité pour un enfant.

Mais la musique est incomparable, délicate, légère et farceuse. On est dans l’univers de l’enfance de Debussy, dans la lignée de Children’s corner dont on retrouve quelques thèmes.

La dernière version que j’ai écoutée est coincée au fond d’un album regroupant trois pièces différentes, et dont le dénominateur commun est la narration de la présentatrice Laurence Ferrari. J’ai mis un peu de temps pour me souvenir que j’avais ce disque, tout simplement parce que la Boîte à joujoux avait à l’époque été éclipsée par l’histoire de Ferdinand le taureau. Eh oui, le Grand devait avoir dans les trois ans, et le livret de Debussy ne faisait pas le poids face à l’histoire du taureau qui pose ses fesses sur un bourdon.

ET LE GRAND A CHOISI…

Finalement, je n’ai rien proposé du tout. Alors que j’avais vaguement évoqué le concert à venir, le Grand m’a prise de court « Je peux écouter la Boîte à joujoux? » Ah, oui bien sûr mais laquelle ? « Celle qu’on a écouté dans la voiture cet été ? » Banco, c’est l’ensemble Agora qui a gagné ! Depuis l’album tourne, encore et encore…


Les références

La Boîte à Joujoux, ed Didier Jeunesse, texte de Rascal, narration par Nathalie Dessay, interprété par l’ensemble Agora.
Disponible sur Deezer, mais j’aurais bien aimé quand même feuilleter le livre !

L’histoire de Babar, Ferdinand le Taureau, La Boîte à Joujoux, ed. Virgin Classic, La Boîte à joujoux est interprétée par Jérôme Ducros (piano)

Children’s Corner, La Boîte à joujoux, ed. Le Petit Ménestrel. La boîte à joujoux est interprétée par Alberto Neuman (piano)

! Je n’ai pas écouté la version parue chez Gallimard, avec une orchestration pour corde et vents sur le livret original.

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6 réponses à LA BOITE A JOUJOUX

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  5. dimdim dit :

    La version originale n’avait pas une dimension romanesque, elle a été écrite a l’époque du dada et préfigure le surréalisme. L’édition du Petit Ménestrel en 1966 est proche des intentions des auteurs. C’est une fausse bouffonnerie à la manière du théâtre guignol. Je trouve que l’original, que ce soit la partition piano tout comme le texte et l’univers illustré de Hellé, est paradoxalement proche de la performance en art contemporain d’aujourd’hui.

    Elle est à mon sens plus enrichissante que la version récente chez Didier jeunesse, qui elle ne laisse pas de place a l’énigme. Cette dernière a pourtant l’avantage de présenter la version orchestrée (qui a été terminée par André Caplet à la mort de Debussy), mais elle est flatteuse et formatée.

    Ma fille de 5 ans préfère, comme moi, la version Petit Ménestrel.

    • Les Petits Mélomanes dit :

      Bonjour,
      merci pour ce retour très intéressant. Effectivement, la version originale tient plus de la didascalie, plutôt dans l’idée du ballet pour enfants. Cela a l’avantage d’ouvrir à l’interprétation… et à la réécriture.
      Quant au comparatif entre les versions, je suis ravie d’apprendre que votre fille préfère celle du Petit Ménestrel ! Chez nous encore une fois c’est l’ensemble Agora qui a gagné, et c’est vrai que cette version est, sinon séduisante, plus séductrice. Ce qui n’est pas péjoratif, car c’est aussi comme ça qu’on emmène les enfants vers la musique classique 🙂

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